Paris, le 27 avril 2020

 

Monsieur le Ministre,


 

Vous avez annoncé que vous alliez rendre public, dans les jours qui viennent, un ensemble de mesures concernant la filière du livre.

Nous avons de sérieuses raisons de redouter les conséquences de la période que nous traversons sur la vie et l’activité de l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre. 

La fermeture des librairies (qui met de nombreux libraires indépendants dans une situation délicate) a aussi un effet immédiat et direct sur nos maisons d’édition. Nous craignons qu’un certain nombre d’éditeurs d’indépendants n’y survivent pas. 

S’ils disparaissent, ce sont des catalogues qui vont disparaître des rayons des librairies. C’est avant tout la capacité de création éditoriale, la diversité et le pluralisme culturel de notre pays qui seront abimés. Dans certains domaines, en particulier ceux qui sont jugés non commerciaux, les petits éditeurs, les éditeurs indépendants qui sont animés avant tout par la passion du livre, jouent un rôle de création essentiel. C’est le cas notamment pour la poésie, la nouvelle, la philosophie, l’essai, la traduction, l’histoire régionale et sociale, le livre jeunesse… 

Parmi les mesures qui nous paraissent indispensables, il y en a une à propos de laquelle nous vous avons écrit dès les premiers jours du confinement et sur laquelle vous nous permettrez de vous relancer.

Les circonstances actuelles rendent en effet urgent la mise en œuvre d’un tarif postal préférentiel pour le livre, à l’image de ce qui existe pour la presse. 

Actuellement les tarifs postaux qui nous sont imposés quand nous envoyons nos livres aux libraires, aux bibliothécaires, aux lecteurs, pèsent très lourd dans l’économie de nos maisons.

Cette revendication qui est aujourd’hui soutenue par plus de vingt associations d’éditeurs, nationales et régionales, n’est pas une revendication catégorielle, voire « corporatiste ». Elle répond à une nécessité pour tous les acteurs de la filière du livre : qu’ils soient auteurs, éditeurs, distributeurs, libraires, bibliothécaires, lecteurs.

Elle a d’ailleurs fait l’objet de plusieurs pétitions dont celle qu’avait lancée notre association et qui avait recueilli plus de 4 000 signatures.

D’autre pays européens, comme vous le savez, pratiquent une tarification spéciale. 

En France, il existe un tarif postal particulier, dit « livres et brochures » qui n’est appliqué que pour les envois à l’étranger, afin d’aider à la promotion de la culture française à l’étranger. 

Mais aujourd’hui, c’est ici même et maintenant qu’il faut soutenir la diffusion de la culture. 

Nous pensons donc qu’il faudrait sans tarder généraliser ce tarif aux envois de livres en France et dans les TOM-DOM. 

Il n’est pas dit qu’un tel tarif entraîne un manque à gagner pour la Poste, car il pourrait favoriser en retour une plus grande circulation postale des livres.

Ne pas donner droit à cette revendication serait par contre favoriser les géants du commerce en ligne qui risquent fort de profiter de la crise actuelle, au détriment des autres acteurs de la filière.

Vous remerciant par avance de l’attention que vous porterez à notre demande, nous sommes à votre disposition pour toute concertation et vous prions de croire en l’assurance de notre considération.


 

Francis Combes

président de l’Association l’Autre livre*

 

* L’Autre livre réunit actuellement 175 éditeurs indépendants.